C’est le 2 mai 1882 qu’un homme d’affaire Bruxellois et un musicien Français résidant à Bruxelles, amateurs de trompe de chasse, décidèrent de fonder un groupe de sonneurs en vue d’animer la messe du 03 novembre suivant en l’église du sablon, ancien siège de la confrérie de Saint Hubert.
Le premier, Max de VILLERS GRANDCHAMPS, dont le nom, si l’on en croit un journaliste à la plume imaginative, évoquait le départ d’un cheval au galop, avait été invité à une chasse à courre en France et en était revenu enthousiaste par une messe de Saint Hubert sonnée en trois parties.
Le second, Emile JACQUEMAIN, qui avait enseigné la trompe dans son pays, parvint à convaincre quelques camarades sonneurs à se joindre à lui. Le cercle Saint Hubert était né.
Que se passait-il en 1882 ? La Belgique venait de fêter le cinquantième anniversaire de son indépendance. Le Palais de justice de la place Poelart n’est terminé que depuis quelques années. Stanley revient de sa troisième expédition au Congo, la première au service de Léopold II et se prépare à repartir aussitôt pour son quatrième voyage.
Depuis 1880, se développent, dans divers domaines, des mouvements rénovateurs. En politique, les idées de Karl Marx, qui mourra l’année suivante, commencent à faire leur chemin et dans les milieux industriels, apparaissent les premiers groupements d’ouvriers, tandis qu’au parlement se manifeste une première tentative d’extension du droit de vote, jusque-là réservé aux seuls propriétaires, aux citoyens qui ont fait des études.
Parallèlement, un mouvement culturel nouveau, rompant avec l’académisme conservateur, prend naissance par la fondation, un an plus tôt, de la Jeune Belgique. MAETERLINCK a 20 ans, ENSOR 22, HORTA 21, Emile VERHAEREN 27, tandis que leurs ainés, Camille LEMONNIER, âgé de 38 ans sera proclamé l’année suivante, « maréchal des lettres Belge ».
Mais, revenons à nos deux compères fondateurs et à leurs amis sonneurs. Ils se réunissent régulièrement dans une sorte de guinguette dénommée « La laiterie » qui subsistait sur les terrains du cinquantenaire, vestige de l’exposition de 1880. Ils répètent d’arrachepied et, le 03 novembre 1882, ils sonnent du jubé de l’église du sablon, la première messe de Saint Hubert. Cela deviendra une tradition qui ne s’est jamais démentie jusqu’à nous jours : la participation à cette messe était, non seulement le vœu des fondateurs, mais devint une obligation pour le cercle dans toutes les versions des statuts qui se sont succédé.
Les deux fondateurs continuèrent leur activité au sein du cercle pendant de très nombreuses années. Max de VILLERS GRANDCHAMPS, le premier président le resta jusqu’en 1920 et, toujours membre du conseil d’administration, reçu le titre de président fondateur en 1926,
soit 44 ans après son initiative. Emile JACQUEMAIN, lui, exerça les fonctions de Maître Sonneur jusqu’en 1920 également, et composa de nombreuses fanfares en dédiant plusieurs au cercle. Quelques-unes de ces fanfares sont encore aujourd’hui au répertoire de nos sonneurs.
Peu après la messe du siècle, en 1900, qui eut un succès de foule considérable, les chasseurs qui patronnaient le cercle, changèrent son nom en CERCLE HALLALI, qui, selon eux, faisait plus « vénerie ». Mais, cela ne dura que de 1901 à 1910, année au cours de laquelle on reprit le nom de Saint Hubert que le cercle n’abandonnera plus. Le retour à l’appellation originelle s’explique peut-être par un incident qui opposa le cercle et le curé du sablon au directeur du conservatoire tout proche. Celui-ci, le compositeur de musique religieuse déjà fort réputé, Edgard TINEL, semble n’avoir pas supporté que les notes émises par les trompes au sablon traversent la rue de la Régence et viennent heurter ses oreilles de musicologue classique. Il tenta de faire cesser ces sonneries indignes en s’adressant aux autorités religieuses. L’intervention du Cardinal, alors Cardinal MERCIER, et peut être aussi le retour au patronage du Saint des chasseurs, permirent la continuation des messes de Saint Hubert sonnées par des trompes de chasse.
Vint l’occupation de la première guerre mondiale, au cours de laquelle quelque fidèle se réunissaient en forêt le 03 novembre pour sonner quand même une discrète saint Hubert.
En 1920, cercle décide de se doter de statuts. Il s’agit d’un texte manuscrit qui ne reçut aucune publicité. On y découvre deux catégories de membres. Les membres honoraires (qui contribuent par leur souscription, à la prospérité du cercle et qui payent une cotisation de 30 francs par an) et les membres actifs (qui sont les « exécutants » et sont invités à participer à une répétition obligatoire et à une répétition facultative chaque semaine.) au terme de ces statuts, le but du cercle est de maintenir le prestige de la trompe et de prêter son concours à toutes les manifestations sportives.
Par arrêté du 07 avril 1923, le cercle est autorisé à porter le titre de Cercle Royal.
En 1929 est publié un annuaire qui comporte aussi de nouveaux statuts. Ceux-ci prévoient toujours que le but du cercle est de réunir des sonneurs de trompe de chasse et de prêter son concours, à titre grâcieux, à l’exécution de la messe Solennelle de Saint Hubert en l’église Notre Dame des Victoires au Sablon. Le cercle réunit 46 « Membres Hauts Protecteurs », 116 « Membres Honoraires » et 34 « Membres Sonneurs ». La cotisation annuelle est fixée à 100, 50 ou 25 francs selon la catégorie de membre.
Parmi les membres on reconnait des personnes qui sont déjà célèbres ou le deviendront : le sonneur Robert MERGEAY, Adolphe BUYL, le directeur de l’Etoile Belge, le Baron CARTON DE WIART, le Baron EMPAIN, le ministre Maurice LIPPENS, Victor ROSSEL, le directeur du Soir, le fondateur DE VILLERS GRANDCHAMPS, l’avocat et poète Thomas BRAUN, le sculpteur Pierre de SOETE, l’écrivain Louis DUMONT-WILDEN, l’un des fondateurs du pourquoi pas ?
Le cercle se constitue en ASBL en 1930.
Au fil du temps, le cercle a quitté la laiterie du cinquantenaire pour occuper divers locaux dont l’un à l’avenue Louise mais les archives ne sont pas très explicites à ce sujet. Ce qui cependant est certain, c’est que le 28 avril 1920, il s’installe au n°1 de la rue Victoire. Puis, de 1930 à 1948, la taverne du globe à la place royale et, ensuite, de 1948 à 1982, au 30 boulevard de Waterloo.
Dans les années 1920, le Saint Hubert n’hésite pas à suivre l’évolution technologique moderne : c’est ainsi qu’on trouve dans les comptes une dépense exceptionnelle pour la réparation de l’appareil de TSF. Par ailleurs, depuis 1925, il est fait à plusieurs reprises, allusion des sonneurs à cette même TSF. Les documents font aussi mention d’un voyage du groupe à Paris aux fins d’enregistrement de plusieurs disques de sonneries de trompe. Cela se passa en 1928.
Au cours de toute son histoire, le Groupe des sonneurs a participé à d’innombrables manifestations philanthropiques, charitables, folkloriques, sportives et officielles. Il en fut ainsi à la commémoration du douzième centenaire de Saint Hubert en 1927, aux fêtes du centenaire en 1930 où le groupe figurait dans l’ommegang, représentant l’entrée de Charles Quint à Bruxelles, et à l’inauguration du stade du Heysel la même année.
Durant la seconde guerre mondiale, les répétitions des sonneurs se poursuivirent tant bien que mal et, le 3 novembre, fidèlement, une messe blanche était sonnée au local, en petit comité. Ce local fut un moment réquisitionné par l’armée occupante. Lorsqu’il ne le fut plus, le cercle y organisa des fêtes ou des tournois de bridge au profit su Secours d’Hiver ou au bénéfice de l’envoi de colis à ses membres prisonniers.
Après la libération, les activités reprirent de plus belle. On revit les sonneurs à de nouvelles cérémonies telle la joyeuse entrée du roi Baudouin à Arlon en 1953, l’inauguration du pavillon de la forêt, de la chasse et de la pêche à L’expo 58 et plus près de nous à l’exposition internationale de Vancouver en 1986.
Parmi les organisations qui apportèrent un lustre particulier au cercle, figurent évidement les manifestations qui commémorèrent les anniversaires de sa fondation spécialement les 50, 75, et 80 ans du cercle.
En vue du cinquantième anniversaire, le cercle décide faire réaliser un vitrail destiné à l’église du sablon. Ce vitrail comporte en son motif central une représentation des sonneurs. Son financement sera assuré par souscription et son inauguration interviendra en 1934. C’est également à l’occasion du cinquantième anniversaire, en 1932, qu’il fut décidé de faire frapper une médaille d’honneur du cercle, destinée à honorer les personnes, belges ou étrangères, membres ou non, auxquelles le Saint Hubert désirait tout spécialement rendre hommage. Sa réalisation fut confiée au sculpteur Pierre DE SOETE, membre du cercle et statuaire bien connu et auteur notamment de la très belle statue à la gloire de l’aviation qui ouvre l’avenue Franklin Roosevelt.
En 1953, à l’initiative du président VAN DEN BULCKE, le cercle dote ses sonneurs d’une tenue de vénerie : Habit écarlate à la française à parements bleus, culotte blanche, toque de velours, bottes Chantilly à haute tige, dague de chasse, ceinturon tressé de fils d’or et d’argent. Cette magnifique tenue est admirable chaque année, le 03 novembre.
Ces nouvelles tenues firent merveille aux fêtes qui célébrèrent les 75 ans du cercle au cours de manifestations prestigieuses qui occupèrent deux journées entières : un festival international de trompes de chasse dans le parc de Bruxelles, un grand bal de la chasse et de la vénerie dans les salons du cercle Gaulois, la messe de Saint Hubert célébrée et sonnée dans la cour d’honneur de l’abbaye de la Cambre, un déjeuner au cercle de l’étrier ainsi qu’un Drag en forêt de Soignes qui déroula ses fastes entre le champ de course de Boisfort et celui de Groenendael.
En 1962, la célébration du quatre-vingtième anniversaire fut aussi somptueux. Messe célébrée à la cathédrale Saint Michel et Gudule devant les plus hautes autorités du pays, patronage d’une exposition de la chasse au cercle Gaulois assortie d’un concours de trophées et, enfin, banquet suivi de bal au cercle Gaulois également. Parmi les dirigeants du cercle qui nt pris part à l’organisation de ces manifestations, on relève les noms du Baron et de la Baronne JANSSEN, de Messieurs André COTE, Louis VAN LOYE, Jaques VELDEKENS, Etienne LANNOY, et Edmond STEVELINCK.
Traditionnellement, chaque année, la messe du 03 novembre est suivie du banquet annuel, le plus souvent organisé au local même du cercle ou lorsque cela ne fut pas possible dans un restaurant réputé. Exceptionnellement, le 03 novembre 1973, en signe de deuil, le banquet fut remplacé par un buffet froid par suite du décès du président VAN DEN BULCKE. Ce banquet fut préparé avec dévouement par mesdames DE KEERSMAEKER, VAN LOEY, MOSTERT, VERDICKT, et autres dévouées. Nous en profitons pour rendre un hommage à ces charmantes dames ainsi qu’à quelques autres tout aussi charmantes d’ailleurs qui continuent à contribuer à la vie du cercle.
Les archives n’indiquent pas avec précision à partir de quelle époque les membres se sont livrés, intensément, à des activités « bridgesques ». Tout porte à croire que cela vint petit à petit. Pendant la guerre 40-45, furent organisés plusieurs tournois de Bridge au profit su secours d’hiver et d’autres œuvres. Il est vraisemblable que, depuis longtemps, les membres y jouaient au cercle.
L’indication la plus ancienne que l’on trouve, d’une intervention du cercle en tant que tel est une décision de 1949, de donner des leçons de Bridge aux membres joueurs et d’organiser un concours de bridge entre les membres. Par ailleurs, en 1945, est organisé un tournoi de bridge et …de couillon.
Ultérieurement, les activités bridgeuses se développèrent considérablement : A l’occasion du septante-cinquième anniversaire, il fut organisé un tournoi ouvert à des délégations d’autre cercles. A cette époque, la section de Bridge était placée sous la présidence de Robert ROYLS et la vice-présidence de André COTE.
Les derniers statuts publiés, qui datent de 1954 et qui régissent toujours le fonctionnement du cercle, traduisent dans les textes, une situation de fait et citent pour la première fois une catégorie de membres bridgeurs.
Parmi les multiples membres du cercle, nous en citerons un en particulier, haut en couleurs, qui a permis au cercle, par son implication sans relâche, de continuer à vivre. En effet, à monsieur Marc Zimmer et à sa ténacité pour attirer de jeunes sonneurs tant à la trompe en général qu’au cercle en particulier que nous devons de pouvoir encore chaque année entendre cette messe en l’église du sablon et voir vivre le plus ancien des cercles de trompes de Belgique. Ainsi, aujourd’hui encore, le cercle continue de perpétuer ces traditions. Ses sonneurs participent encore chaque 03 novembre à la messe de saint Hubert au sablon ainsi qu’à d’autre événements tout au long de l’année. Nous citerons en exemple la Saint Hubert de la commune de Uccle, le grand feu de Walhain et j’en passe. Les bridgeurs se réunissent également deux fois par semaine et participent toujours à des tournois.
14 Responses
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